Un matin d'un calme joyeux. Contre le petit berceau, un rayon de soleil avait réussi à s'immiscer entre les deux rideaux tirés qui tamisaient l'éclairage. Au fond de ce petit cocon, les bras potelés relevés de chaque coté de son visage, une toute petite fille dormait à poings fermés, les lèvres légèrement entrouvertes, le souffle léger, recouverte d'un tissus qui tenait plus du voile que du drap, en cette température des plus estivales.
Le bruit du jet d'eau dans la pièce attenante cessa, et quelques minutes plus tard, une jeune femme en sortit, une simple serviette enroulée autours du corps, et se pencha au dessus du berceau avec toutes les précautions possibles. Satisfaite de l'air détendu du bébé, Syëhl releva la tête juste à temps pour sentir deux bras passer autours de ses épaules et l'attirer en arrière doucement.
- Tu vas être mouillé, le prévint-elle avec un rire tout en se frottant malicieusement contre le torse de son mari, je viens de sortir de la douche !
- Je m'en serai douté à ta tenue, rétorqua celui-ci, un brin taquin, sans sembler être gêné par sa chemise désormais trempée par les longs cheveux de sa compagne.
Syëhl inspira avec bonheur et se laissa un peu aller contre Matt. Comme tout ceci semblait utopique ! Et pourtant, elle savait bien qu'à tout moment, lui, elle, pouvaient être appelés à mener des missions périlleuses, à être séparés, à risquer leur vie pour cette cause que tous deux s'étaient juré de servir, bien avant même de se jurer fidélité. Mais aujourd'hui, dans la chaleur de ces bras qui semblaient vouloir la protéger, elle et leur fille, de tout, rien ne parvenait à l'attrister. Les choses avaient déjà pris une tournure si inattendue pour elle, que très souvent, il lui fallait se prouver qu'elle ne rêvait pas, qu'elle n'allait pas se réveiller dans quelque chambre d'hôtel lambda et miteuse, la haine au c?ur, et avec pour seul but, ce qui si longtemps l'avait soutenue seule dans l'ombre où elle survivait : venger son mentor.
Se détachant avec douceur de ses bras, elle fit quelques pas pour contempler de nouveau le fruit de cette nouvelle vie, qui dormait du sommeil du juste sous la vigilance tendre de ses parents.
- Et dire que de tout cela, je n'aurais jamais rien su, si le Conseil n'avait pas décidé de me laisser ma chance?. Si j'avais choisi Gaïlon, à l'époque. Tu te souviens ? ajouta-t-elle à mi voix sans détourner la tête de la petite Leï.

Couvant la jeune femme des yeux, Matt Dreis mis un instant à répondre. Son regard saisissait chacun des mouvements de sa femme. Oh oui, il se souvenait. Et elle était exactement la même extérieurement, la même silhouette féline auréolée de ses longs cheveux d'ébène. S'il n'avait pas prévu où cette découverte le mènerait, lui, avait tout de suite compris que sous l'apparente dureté de ces traits fins éternellement ironiques du début, dédaigneux même, se cachait une souffrance et un c?ur passionné, capable de choisir la lumière si on lui en donnait l'opportunité. Avec un sourire au coin des lèvres, d'autres images, d'autres souvenirs des moments passés ensemble à se connaître lui revinrent. Ce qu'il n'avait pas non plus envisagé, c'est que le caractère rebelle, fier et impulsif de cette petite « fille apeurée » d'Adarlon, comme il aimait l'appeler quand elle cédait à sa colère, après l'avoir fortement énervé, chez la jeune Padawan, l'intriguerait et l'attirerait. Il se rapprocha de Syëhl toujours entourée de sa serviette et, l'emprisonnant de nouveau de ses bras, lui posa comme il le faisait souvent déjà à l'époque, une bise sur le front.
- Si je m'en souviens ? Comme si c'était hier, murmura-t-il en portant à sa joue la main de sa femme pour lui remémorer un certain épisode qui avait commencé à les lier, il y a de cela de nombreux mois. Aucun besoin de parole. Syëhl rougit fortement et se lova câlinement contre lui, comme pour se faire pardonner un geste par un autre.