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LA VOIE DU SILENCE : STROPHE UNE : L'EVEIL DE LA CONSCIENCE
Un rayon de soleil vint dénicher la paupière du zabrak endormi. Un jour comme les autres dans une vie des plus banales.

Un pied, puis l'autre. C'est toujours la même chose. Le zabrak à demi éveillé se dirigea vers sa cabine de douche. Etre rapide c'était essentiel sur Iridonia qui prônait l'économie de l'eau.
Se regardant dans la glace il ne vit qu'une fois de plus ce visage émacié, fébrile, malgré une bonne constitution. Seuls les plus forts survivaient sur ce caillou acide. Sa combinaison rapiécée pendait sur un rebord de fenêtre : il économisait pour s'en acheter une nouvelle.
Sa pauvre chambre faisait triste mine, elle était le reflet d'une vie de privation et de travail chichement payé.
Avalant un semblant de bouillie, le zabrak mit la main sur son écusson lustré. Jabban Tuek, voilà sa seule identité en ce bas monde.
Sortant dans la rue, l'odeur se fit plus oppressante. Une odeur viciée de sueur d'une population massée dans de minuscules quartiers, une odeur à laquelle jamais on ne peut s'habituer. Plissant les yeux le zabrak descendit la rue pour aller saluer sa mère.
La vieille zabrak n'y voyait plus tellement ; elle était seule à élever ses deux derniers, son père travaillait comme un forçat pour apporter un maigre salaire.
Entrant, Jabban se fit accueillir par les cris des deux garnements qui se battaient joyeusement au milieu de la salle commune. Son entrée fut accueillie avec force de hurlements et deux furies se jetèrent sur lui pour le bourrer de petit coups de poing. Trya et Zodien, une soeur et un frère, deux jumeaux que seuls le sexe et la forme du visage pouvaient les différencier. Deux chahuteurs et fonceurs, deux gamins zabraks comme tant d'autres.
Et pourtant un air de malice venait affiner leurs traits. Toutes ses poches furent retournées à la recherche d'un cadeau. Jabban, avec un sourire taquin, sortit les mains de derrière son dos mettant à jour deux pierres striées de couleurs vives.
Un « OOOoooooh » admiratif vint saluer la découverte des deux petits trésors.
« - C'est un capitaine de navette qui me les a données. Je lui ai parlé de deux boules de piques qui ne faisaient que se battre toute la journée et il m'a dit que la prochaine fois il vous ferait visiter son vaisseau. enfin, si vous êtes sages ! » Un hululement joyeux et une nouvelle tempête de petits poings accueillirent la nouvelle.
- Tu les gâtes trop ! Tu ferais mieux d'aller travailler ! ». Sa mère avait toujours une façon très à elle de l'accueillir. Le jeune zabrak vint la serrer dans ses bras et reconnut une fois de plus l'odeur très particulière des plantes qu'elle cultivait sur son balcon, une odeur qui avait toujours sa place dans un coin de son cerveau car c'était ainsi qu'il se rappelait sa mère.
« - Je vais y aller. Papa m'attend, on a un gros client aujourd'hui et ils ont mis tout le service dessus.
- Ton père ne viendra pas travailler aujourd'hui. Son dos, tu sais bien. Il n'a pas réussi à se lever de son fauteuil ce matin.
»
Jabban haussa un sourcil inquiet et promit à sa mère d'appeler le médecin de la compagnie. Ce travail ne convenait décidément plus à son vieux père.
Après avoir été l'embrasser, tandis qu'il maugréait une fois de plus à cause de son dos, notre ami prit le chemin des docks.
Tout était sans dessus dessous et même à 500 mètres de l'astroport on pouvait observer que ce n'était pas un jour comme les autres. Un énorme cargo venait d'atterrir monopolisant tout le service de déchargement.
Jabban s'empressa de pointer et se dirigea vers la zone de déchargement du cargo. Il était le premier de sa section à avoir pointé, il allait devoir diriger les différentes phases du débarquement avant l'arrivée du contremaître.
Un individu encapuchonné sortit par un sas dérobé du cargo.
« - Hep ! Monsieur ! Il y a un temps de latence avant le débarquement des passagers ! Monsieur ! » Le zabrak courut après cet individu mystérieux qui semblait presque flotter tellement sa cape voletait dans l'air du petit matin.
Arrivé à quelques pas de l'individu, celui-ci se retourna et Jabban commença à décharger plusieurs caisses. Le reste de la section arrivait petit à petit et le train train reprenait son cours, la routine.
Les vieux amis de son père s'enquirent de son absence lui qui était matinal et comprirent bien vite que celui-ci ne mettrait plus de si tôt un pied aux docks.
C'était un cargo de l'Alliance Galactique. Ici, on ne posait pas de questions surtout lorsqu'il s'agissait de l'AG.
Tout l'astroport, la ville même, était situé dans un canyon. Quelques canyons subsistaient depuis que l'Empire avait fait des zabraks un exemple en les décimant. L'AG contrôlait Iridonia aujourd'hui, la population s'était diversifiée et quelques avant-postes s'étaient développés, comme celui dans lequel Jabban résidait.
Les caisses étaient remplies d'armes? Tous les gars le savaient. Pas de question, la règle était pourtant claire. Mais savoir qu'Iridonia servait au trafic d'armes ! Jamais les zabraks n'avaient été manipulés. Les temps changeaient.
Haussant un sourcil après avoir vu le contenu d'une caisse, Jabban se fit accoster par un des membres de l'équipage.
« - Hep toi ! Reprend ton travail ! »
Ravaler sa fierté c'était la condition d'un travail réussi. Les accidents, les brimades, les mauvais traitements étaient fréquents mais il fallait bien vivre.
Toute la journée avait consisté à décharger des caisses, et, épuisé, Jabban revint en traînant les pieds pour s'abattre sur son lit, plongé dans un sommeil sans rêves.

Le lendemain, Jabban dû repriser un trou d'usure sur sa combinaison. Il s'était levé plus tard, il n'aurait pas le temps de manger une fois de plus. Courant vers le spatioport il se fit bientôt héler au détour d'une sombre ruelle. S'approchant, il reconnut un des membres de l'équipage accompagné d'autres types du cargo. Une autre forme à terre, indéfinissable, semblait gémir.
Le zabrak s'approcha et vit bientôt qu'ils avaient abusé de boissons alcoolisées. Ils voulaient casser du zabrak, à coup sûr.
« - Que me voulez? » Jabban baissa les yeux sur la forme qui gisait à terre. Son souffle se coupa et bloqua les derniers mots au creux de sa gorge. Une zabrak, pleurant, gémissant, les vêtements arrachés et avec un bras qui formait un angle contre nature regardait ses agresseurs les yeux implorants.
Le sang de Jabban se glaça au fond de ses veines. Serrant les poings il attrapa une planche posée contre le mur et frappa le premier garde de l'AG.
« - Pourritures ! Nous sommes un peuple et nous sommes fiers ! » Le zabrak atteint d'un coup de poing un deuxième garde au creux de l'estomac. Puis une explosion d'étincelles surgit devant ses yeux et un violent mal de crâne le saisit alors qu'il était frappé à la nuque. Tombé à genoux prés de la Zabrak tremblante, Jabban cracha une gerbe de sang à terre.
Levant les yeux, il eut à peine le temps de relever la tête pour voir le pied de son agresseur le cueillir à la mâchoire et l'envoyer s'écraser contre un mur.
Un craquement lui fit craindre de s'être cassé une corne mais il n'eut pas le temps d'y réfléchir plus longtemps. Sa fureur s'était décuplée. Des années d'impuissance appelaient vengeance. Le zabrak se releva d'un bond et observa son adversaire immédiat.
Se battre est une chose, mais savoir que l'on va être défait en est une autre. Pourtant l'espoir tordait le coeur de Jabban, et un feu inconnu brûlait au fond de ses entrailles. Tout était plus clair : l'affrontement, le dénouement. Il savait qu'il pouvait vaincre. Ses mains crépitaient d'une énergie nouvelle, et, observant sa planche qui était son seul moyen de défense, il la vit ni plus ni moins venir droit dans ses mains. Ne se laissant pas le temps d'être surpris, il frappa immédiatement un de ses adversaires. Le combat fut rude, et tenir tête à de multiples ennemis ne pouvait durer qu'un temps. Une fois de plus, un coup lui fit plier les genoux et tomber au sol. Un de ses opposants, furieux, frappa la zabrak à terre pour en tirer quelques gémissements. Epuisé, Jabban s'adossa au mur, attendant la délivrance.
Le cri d'un des gardes lui fit ouvrir les yeux.
Une silhouette encapuchonnée venait de frapper un des combattants, et de l'envoyer avec une force titanesque contre un de ses congénères. Un objet jaillit hors de sa main et une lumière apparut dans un bruit d'éclair. Le reste de la bande s'enfuit au loin sans demander son reste.
La silhouette se pencha au dessus du corps de la zabrak. Elle était morte durant l'affrontement, après d'ultimes souffrances. Jabban, sans un mot pour son sauveur, se pencha au dessus du corps inerte et le serra dans ses bras en pleurant.
Levant les yeux, il distingua un regard perçant à l'intérieur de la capuche.
Une main rouge s'éleva hors de la cape et Jabban se leva et sortit. Son hématome à la joue le faisait souffrir, mais à part ce bleu et une corne fêlée il s'en sortait bien. Il rabattit ses cheveux en avant pour cacher les dégâts de l'affrontement. Après être rentré, il avait dormi d'une traite et manqué sa journée de travail. Il devrait se rattraper aujourd'hui.
Ses souvenirs se faisaient flous par rapport à l'affrontement, mais il savait qu'on ne lui pardonnerait pas de s'être opposé aux associés d'un client, même s'il ne s'agissait que de quelques gardes de l'Alliance Galactique. Les docks grouillaient de monde ce matin là.
Une autre rixe avait eu lieu, alors que les caisses commençaient à être embarquées dans le cargo pour son départ prochain. Des gardes amochés avaient provoqué un jeune zabrak et l'avaient tué. Une foule furieuse hurlait à présent après les meurtriers, et Jabban parvint à se faufiler jusqu'aux premiers rangs.
C'était bien ses agresseurs. Ceux-ci étaient acculés au cargo, et la peur déformait leurs traits.
La foule en ferait de la charpie et justice serait rendue.
Mais un individu en cape apparut soudainement.
Sa rapidité d'intervention, et son visage caché firent taire la foule en colère. Il avait les deux bras levés et s'interposait devant les zabraks enragés, massés prés de la carcasse métallique du vaisseau.
L'individu retira sa capuche et se mit à parler. Sa voix couvrait le tumulte et imposait le respect. On ne pouvait l'ignorer, mais au-delà des derniers rangs.
« - Je comprend votre peine, mais ne laissez pas vos émotions vous dominer. Ces méprisables individus seront punis à la juste mesure de leurs crimes. Nous ne sommes pas des envahisseurs, et ils se sont comportés en tant que tels. »
La foule était subjuguée, pas tant par le discours de l'homme, mais par son apparence : c'était un zabrak. De nombreux tatouages parsemaient sa peau, et les cornes qui cernaient son front était petites mais acérées, preuve d'une excellente condition physique.
Un des ouvriers du dock s'avança : « [color=violet]- Et qu'est ce qui nous permet de te croire ? Tu es l'un des nôtres et tu vis avec eux ! Tu es un traître à ton sang, à ta race ! [/color]»
Il dû bientôt regretter son geste, car, d'une voix calme, mais perçante, l'individu grava ses paroles dans l'esprit de chacun de ceux qui composaient l'assemblée.
« - Je suis un Jedi »
Plus un seul bruit ne se fit entendre hormis le vent qui soufflait au loin. A l'instar de ses congénères, Jabban était muet et la curiosité étreignait son imagination.
Le Jedi ouvrit un sas et y fit entrer les gardes, après les avoir fait escorter d'autres soldats de l'AG.
Revenant sur ses pas, il fit un geste devant toute l'assemblée et clama d'une voix à peine audible : « - Reprenez votre travail ».
Au grand étonnement de Jabban, la plupart des ouvriers se dispersèrent comme si de rien n'était, et recommencèrent l'embarquement des marchandises.
Le zabrak, seul, était maintenant face au Jedi.
Celui-ci avait les yeux rivés sur lui, et s'approcha à pas légers mais puissants.
Se retrouver devant une ?uvre majestueuse, devant un bâtiment gigantesque et millénaire, cela vous donne un sentiment d'humilité extrême, comme si l'on réalisait enfin que nous ne sommes qu'une poussière en ce bas monde.
Imaginez le sentiment de Jabban face à cet imposant personnage, au visage si amical, qui se plantait à présent devant lui, et commençait à lui parler.
« - Tu ne m'as donc pas entendu ? Retourne au travail.
- Mais que? quel pouvoir? Qu'est ce que vous avez fait aux autres ?!
, dit Jabban bredouillant, tandis qu'une voix dans son esprit lui intimait de ne pas chercher à comprendre et de retourner charger les caisses.
- Je me doutais bien que tu n'étais pas comme les autres. J'ai eu extrêmement de mal à t'imposer de m'oublier à nos précédentes rencontres. J'ai eu peur de te faire des séquelles irrémédiables. Tu te souviens à présent n'est-ce pas ? »
Et effectivement tout lui revint en mémoire. C'était lui qui était sorti avant tout le monde et lui avait intimé de l'oublier. De même dans la ruelle, il l'avait observé longuement avant de lui ordonner de rentrer chez lui.
Mais plus que ça, il l'avait suivi plusieurs fois, il s'en rappelait à présent qu'il voyait son visage.
« - Que me voulez vous ? ». Le Jedi l'observa longuement et sourit.
« - J'étais venu pour observer les comportements des soldats de l'Alliance Galactique dans le secteur. Mais j'ai enfin compris ce qui m'a poussé à revenir ici, sur ma planète natale. C'est toi Jabban.
- Moi ? Que? Comment j'aurais pu vous attirer jusqu'ici ?
, un frisson parcourut la nuque du zabrak et fit trembler son échine.
- Tu ne le sais peut-être pas, mais tu recèles de qualités incroyables pour quelqu'un qui a vécu parmi notre peuple opprimé. Tu es bon, tu es loyal à tes convictions. Mais plus que tout? Tu ressens la Force Jabban. La Force t'as mis en connexion avec moi, j'ai eu l'écho de ton être à travers elle qui m'a guidé jusqu'à toi.
- La Force ?
»

S'éloignant tous deux de l'astroport en parlant, le zabrak en apprit bien plus sur l'énergie mystérieuse qui gouverne toute chose en cet univers.
Sur sa destinée aussi. Il pouvait suivre un apprentissage. Le meilleur des apprentissages, tu seras Maître de ta destinée ! avait dit l'autre, qui lui avait avoué qu'il se reconnaissait beaucoup en lui, car il avait eu une jeunesse similaire.
Intrigué, Jabban comprit bien vite qu'il avait toujours eu le goût de l'évasion, malgré les contraintes qui pesaient ici. Il léguerait toutes ses économies à sa famille, et embarquerait avec le Jedi.
Iridonia lui manquerait?
Une lueur d'espoir brillait dans ses yeux tandis que le Jedi lui promettait de revenir le chercher le lendemain, le temps qu'il rassemble ses quelques affaires.
Enfin sa vie sortait de la routine, et enfin l'aventure semblait l'appeler de tous ses v?ux.
Ce fut une nuit peuplée de rêves qui envahit Jabban alors que les lunes d'Iridonia miroitaient dans le lointain.

A Jabban Report [ß]
STROPHE DEUX : LE DESTIN EST EN MARCHE
Un rayon de soleil vint dénicher la paupière du zabrak endormi. Un jour nouveau, une vie nouvelle, un destin s'offrait désormais à lui.


Jabban n'avait plus dormi comme ça depuis. Depuis la défaite des Yuuzhan Vong. Quel jour cela avait été ! Festins, rires et chants à travers les rues du petit astroport.
Et lui courait après une jolie zabrak qui l'attirait doucement, comme dans un rêve.
« - De bien beaux souvenirs dis-moi ! »
Eberlué, Jabban tomba de sa couchette. Grognant et gémissant en se massant le crâne, il se releva pour se trouver nez à nez avec le fameux Jedi, tout sourire, qui semblait vouloir exhiber sa superbe dentition.
« - Tu as beaucoup de chance, il fut un temps où de nombreux padawans intégraient l'Ordre sans jamais connaître d'escapade amoureuse. »
Alors tout lui revint en mémoire : ce zabrak qui avait fait cesser le tumulte de la foule en révélant sa vraie nature, et qui lui avait promis une destinée semblable à la sienne. Un sentiment de chaleur, de bonheur et d'excitation se diffusa à travers tout son corps, tandis qu'il se relevait et saluait le catalyseur de tous ces changements.
« - Padawan ? Qu'est-ce ? s'interrogea Jabban, alors qu'il procédait à quelques ablutions avant d'enfiler des vêtements que lui tendait le Jedi.
- Tu le sauras bien assez tôt, pour l'instant nous ne devons pas traîner ici : le cargo ne va pas tarder à partir et les évènements d'hier ne m'ont pas donné bonne réputation au sein de l'équipage, je crains des représailles. »
Etonné que quelqu'un d'aussi puissant puisse craindre quelques gardes, le zabrak ne dit pas un mot pendant qu'il terminait ses préparatifs et descendait la longue rue qui conduisait aux docks.
Les derniers adieux n'étaient pas son fort, et il avait préféré expliquer son départ à ses parents le soir précédent, afin de dormir avec la conscience plus tranquille.
Il ne s'attendait pas à ce qu'on le comprenne, et l'effusion de sentiments partagés à laquelle le palabre avait donné lieu l'avait mentalement épuisé. Mais ses parents s'en sortiraient, il leur léguait tout, et assurait ainsi l'avenir des deux derniers rejetons.
Et puis il reviendrait sûrement, du moins l'espérait-il.
Le Jedi marchait vite et bien : de longues enjambées qui auraient eu tôt fait de distancer Jabban s'il n'avait accéléré le pas. Son nom était un mystère pour lui, tout comme son but. Allait-il lui enseigner ses secrets ou le prendre comme simple assistant ? Peut-être s'était-il trompé de personne ! Mais les mots qu'il avait prononcé étaient sans équivoque : Mais j'ai enfin compris ce qui m'a poussé à revenir ici, sur ma planète natale. C'est toi Jabban. Comment pouvait-il?
« - Tu te poses trop de questions. Suis moi et fait le vide dans ta tête, tu m'empêches de réfléchir. » Interloqué, le zabrak obéit néanmoins et chassa ses doutes de son esprit.
Les docks étaient en pleine effervescence : le cargo fumait et trépignait, ses moteurs bourdonnaient sous la carlingue en fer, et l'ambiance était survoltée. Quelques gamins traînaient pour voir le gros vaisseau décoller, Jabban leur fit un clin d'oeil à la dérobade en passant. Tous les gamins de cet astroport avaient la tête dans les étoiles, mais peu d'entre eux auraient la chance de s'enfuir de ce trou perdu. Enfant, lui-même ne cessait d'observer les cartes du ciel et de faire des conjectures sur la destination des vaisseaux de passage ; il savourerait infiniment ce voyage dans le vide intersidéral.
Le sas du cargo était gigantesque, fumant de chaque côté et arborant fièrement les couleurs de l'Alliance Galactique. Mais, quoique cela puisse paraître ridicule, ce fut la cabine qui choqua le plus notre ami. Trois fois plus vaste que sa pauvre chambrée d'Iridonia, elle offrait un luxe et un confort auquel il n'avait jamais été habitué. Il se ferait assez vite à cette vie de pacha.
Le Jedi choisit ce moment pour inviter Jabban à s'asseoir et pour avoir une conversation plus sérieuse avec lui.
« - Ne t'habitue pas trop vite à ce luxe, tout ça n'est que poussière, et les Jedi préfèrent l'ordre et la simplicité, somme toute ce à quoi tu as été habitué depuis tout petit il me semble. Moi-même j'ai vécu ici, le sais-tu ? J'étais comme toi, plein de rêves, d'idéaux? Et puis le destin s'est chargé de me donner une chance d'évasion, chance que j'ai saisie au vol tu penses bien.
- Je ne connais rien de vous et pourtant vous me semblez si proche. Comment dois-je vous appeler sire Jedi ?
questionna Jabban.
- Oh oh ! Ne me donne pas du sire ou du monseigneur ! Appelle moi comme bon te sembleras.
- Hmmm? Et bien vous m'avez promis le meilleur des apprentissages, il me semble donc normal de vous appeler Maître.
- C'est légitime. Voilà qui est dit. Maintenant apprend que nous allons sur Néo-Coruscant, là où siège le Sénat Intergalactique, mais aussi là où tu recevras ton instruction, dans le nouveau Temple de l'Ordre Jedi. Je t'y déposerai et tu n'auras qu'à te présenter comme un nouvel apprenti.
»
Il ne l'accompagnerait donc pas. Etrange, et pourtant l'heure n'était pas aux révélations semblait-il, car le Jedi se leva et partit dans le couloir après lui avoir intimé de rester cloîtré dans sa cabine.
Jabban resterait seul avec lui-même durant tout le décollage. C'était magique. Au début le cargo tressauta, puis les tremblements laissèrent place à un grincement effrayant. Et le vaisseau décolla. La terre s'éloignait peu à peu, et bientôt il traversa une couche de nuages, pour enfin laisser place à l'espace. Les yeux grands ouverts, le zabrak resta collé au hublot un très long moment avant de se tourner vers le reste de la cabine.
Elle était bien aménagée, avec une étagère de livres et une salle d'eau. Le Jedi semblait y résider depuis un petit moment, car son aura imprégnait la pièce, comme dans tout lieu qui est habité et qui s'imprègne de la personnalité de ses résidants.
S'avançant vers l'étagère, Jabban feuilleta quelques livres qui traitaient des plantes médicinales, de la Force, et d'autres notions sans grande importance. Malgré l'atmosphère de la pièce, rien ne trahissait l'identité du Maître. Ce mystère semblait insoluble, tout comme le fait qu'il ne veuille pas faire de remous au sein de l'équipage. Pourquoi un puissant guerrier craindrait quelques saoulards sans intérêts ?
«[color=violet] - Chasse immédiatement cette pensée de ta tête ! [/color]»
Jabban, se retournant, vit le Jedi avancer vers lui à grands pas. Le zabrak recula de quelques pas et se cogna contre une table basse tandis que le Jedi le dominait de toute sa hauteur.
« - Mais qu'est ce que vous avez tous ? Tu veux sombrer du côté Obscur c'est ça ? Tu veux dominer les autres, tu veux les soumettre à ta volonté ? »
Le jeune apprenti était totalement décontenancé et cherchait une issue à cette crise que lui faisait le Jedi. Il ne comprenait pas en quoi être puissant signifiait être mauvais, ni ce qu'était le côté Obscur. Tout ce qu'il voyait, c'était que le Maître se retenait de lui donner une baffe.
Celui-ci respirait violement, par à coups, puis ferma les yeux et se détendit quelque peu sans néanmoins conserver une certaine crispation.
« - Excuse moi Jabban, veux tu ? Je... J'ai du mal à contenir mes émotions quelques fois, et c'est très mauvais pour un Jedi.
Il invita le zabrak à s'asseoir et repris en faisant de longues allées et venues à travers la cabine.
Je te dois quelques explications. Tu te souviens de notre deuxième rencontre, dans la ruelle ?
»
Jabban se remémora cette soirée où des membres de l'équipage maltraitaient une pauvre zabrak et comptait lui régler son compte à lui aussi. Mais tout était flou, comme si quelque chose brouillait son esprit pour l'empêcher de se souvenir d'une partie de la scène. Tout ce dont il se souvenait, c'était le regard pénétrant du Jedi, qui lui intimait de rentrer chez lui.
Il se tourna vers le Maître qui s'abstint de marcher un moment pour lui lancer un profond regard. Alors les souvenirs affluèrent à lui comme une grosse vague viendrait s'abattre sur une digue lors des marées ; il fut encore plus ébranlé de la puissance du Maître, car il se savait maintenant quel avait été son rôle dans cette ruelle.
Il se souvint de la fille. Il la connaissait, il la croisait tous les jours en allant et en revenant du travail. Elle était pleine de vie, belle et riait souvent, d'un rire qui transperçait le brouhaha de la foule et réchauffait tous les c?urs des riverains ; mais ce soir là elle gémissait, des gémissements qui avaient déchirés l'âme du zabrak et l'avaient rendu fou furieux. Et, plutôt étonné, il se souvint de la manière singulière dont il avait attrapé une planche pour se battre ce soir là. Il l'avait attiré grâce à sa volonté, et ce avant que le Jedi ne lui ordonne de rentrer chez lui et emporte le corps.
« - Comment ai-je réalisé cette prouesse ?
- Tu ne te soucies donc pas du sort de cette jeune fille ?
»
Le sang afflua aux joues du jeune zabrak et un profond sentiment de honte envahi son être. Il avait imaginé que cette fille était morte, sans même demander confirmation. La puissance qu'il avait manifestée ce soir là lui avait tourné la tête l'espace d'un instant.
« - C'est ça que je veux que tu combattes Jabban. Ne soit pas tenté comme les autres Jedi par la puissance, par la force. Garde toujours en toi les sentiments qui ont fait ce que tu es aujourd'hui, et conserve toujours cette part de gaieté et de bonté que les autres chercheront à te dérober. Sans cette bonne humeur, on est plus qu'une carcasse dénuée de sens en ce bas monde ; je ne te le souhaite pas.
- Que lui est-il arrivé ?
demanda Jabban dont les larmes emplirent les yeux tellement sa fierté de zabrak avait été touchée par la simple remarque du Maître.
- Elle était bien morte malheureusement. C'est une autre leçon que tu dois retenir. On ne peut sauver tout le monde, et surtout pas au prix de la haine. C'est la haine qui a révélé ton pouvoir, ne la laisse plus jamais te dominer. Un Jedi n'est pas un puissant guerrier : un Jedi est avant tout un homme sage qui sait se contrôler et faire les bons choix. Mais certains ne retiennent pas tous la leçon et finissent dévorés par cette haine qui ronge leurs entrailles jusqu'à les tuer tout simplement? »
Il s'était arrêté et regardait l'espace comme pour signifier qu'il avait lui-même été touché par ce fléau, d'une manière ou d'une autre. Mais le questionner ne ferait que raviver ses émotions, ce qu'il ne semblait pas désirer somme toute.
Jabban, à bout de force, sombra dans un sommeil agité.
- Attrape moi si tu le peux !
- Attend ! Ne va pas par là ! Ils t'attendent ! Reviens !
- ... coupables de trahison. Veuillez procéder soldats à son...


L'apprenti se réveilla trempé de sueur. Le Maître dormait d'un sommeil léger dans un fauteuil. Lui aussi semblait épuisé et soucieux, car ses yeux s'agitaient sous ses paupières et qu'il marmonnait des mots sans rapports les uns aux autres.
Jabban se dirigea vers la salle d'eau pour se laver, tout en méditant encore sur les paroles du Maître. Il lisait en lui comme dans un livre ouvert, ce qui était dérangeant et frustrant. Essayer de cacher ses pensées serait un excellent exercice durant ce voyage avant de se retrouver au milieu de ses semblables et d'être dépouillé et analysé à travers toutes les parcelles de son moi profond sans qu'il ne puisse opposer résistance.
Une phrase lui trottait dans la tête, celle que lui avait lancé le Jedi en revenant dans la cabine. Mais qu'est ce que vous avez tous ?
Pourquoi tous ? Faisait-il référence aux Jedi en général ? Ou à ses apprentis ? Somme toute, cette histoire de Côté Obscur semblait le toucher au plus profond de son être et fait écho à des souvenirs enfouis. Il faudrait tirer cela au clair.
Après avoir enfilé quelques vêtements, l'apprenti sortit sans bruit et commença à visiter le cargo. Ici, tout le monde semblait avoir conservé des habitudes terrestres et s'être couché à l'heure où la nuit régnait sur Iridonia. Mais trop de sommeil le rendait mou, et son envie de visiter le cargo s'était accrue à son réveil. Il était luxueux, on l'avait décoré comme un yacht de luxe. Cette partie du vaisseau devait être réservée aux invités de marque. Quelques membres du personnel parcouraient le couloir dans un sens ou dans l'autre, et plusieurs fois on lui demanda s'il avait besoin de quoi que ce soit. Peu habitué à autant de sollicitude, Jabban décida de s'éloigner de ces quartiers luxueux. Quelques étages plus bas, l'équipage et des passagers moins aisés peuplaient les couloirs et composaient un sympathique patchwork de couleurs, de bruits, et d'odeurs.
Certains jouaient à un jeu appelé pazaak que le zabrak ne connaissait pas. Cela se jouait avec des cartes spéciales, et l'on misait de l'argent. Certains joueurs semblaient chevronnés et plumaient des membres de l'équipage descendus pour se détendre après plusieurs heures de travail. Ils repartiraient travailler les poches plus légères. Plus loin, une mère tendait de faire dormir un de ses enfants qui semblait surexcité par l'idée d'être dans un vaisseau spatial.
Tout le monde ne pouvait pas se payer une chambre? La réalité reprenait le pas sur les douces illusions dont se berçaient les passagers des étages plus en hauteur. Au détour d'un couloir, Jabban se cogna contre un garde qui venait en sens inverse. Celui-ci après avoir grommelé un Vous pourriez pas r'garder où vous mettez les pieds ? poursuivit sa route.
Mais le zabrak l'avait reconnu. Il était dans cette ruelle sur Iridonia. Plus curieux que furieux, il avait compris la leçon que le Maître avait enseignée avec véhémence le soir précédent, il suivit le meurtrier à travers un dédale de couloirs. Plus ils s'avançaient et plus la foule se faisait moins dense. A la fin les couloirs étaient vides et l'apprenti eut plus de mal à rester discret ; mais le garde continuait son chemin sans même se retourner.
Il s'arrêta finalement face à une porte, toqua, et entra. Cependant il ne la ferma pas complètement et celle-ci était encore entrebâillée quand Jabban y parvint.
Des hommes parlaient tout doucement. Ils semblaient faire un rapport auquel le zabrak ne comprenait pas un traître mot. Puis une voix grave et puissante se fit entendre à son tour, une voix qui glaça le sang de Jabban, par son timbre mais aussi pour les paroles qu'elle venait de prononcer.
« - Tu avais raison, il vous a suivi? Il nous écoute. Ouvrez la porte. »
La curiosité est un vilain défaut. Jamais proverbe n'aurait mieux convenu à Jabban à cet instant très précis.



A Jabban Report [ß]