Préambule : chapitre final.

« Je te hais!!! »

Son cri retentit dans la nuit. L’éternelle obscurité, l’éternel mal l’avait pris. Il était hors de lui. Rikon se demanda brièvement comment ils en étaient arrivés là.

Ce n’est plus la question maintenant, pensa-t-il…

Il sortit son arme, un sabre laser à l’allure étrange. Il était incurvé sur la moitié du manche dans un sens, alors qu’il l’était dans l’autre sens sur la deuxième. Il détacha chacune des deux parties, et positionna les lames dans ses deux mains, l'une vers l'avant, l'autre vers l'arrière.

L’homme qui faisait les cents pas devant lui, animé par une colère noire et profonde, s’arrêta pour sortir également ses armes. Elles étaient du même type que celles de Rikon. Il ne les alluma pas. Il reprit sa marche de long en large.

« La haine ne t’apportera que la mort, Soran. »

Rikon fléchit ses jambes, le dos quasiment parallèle au sol. Il regarda son ennemi, en position d’attente. Son sabre laser crépita lorsqu’il activa la première lame, puis la seconde. La couleur bleue de la première reflétait dans ses yeux, tandis que la lueur pourpre de la seconde faisait d’étranges reflets sur sa cape.

Soran s’arrêta, le regarda fixement de ses yeux bouillonnants de colère. Il alluma également ses deux sabres laser aux allures si particulières. Ses lames étaient rouge sang, dégageant une aura de puissance étouffante, caractéristique d’une lame créée à partir d’un cristal synthétique.

Alors il a été jusque là… Une lame rouge, comme celle des Sith. Il était temps que je le stoppe, pensa Rikon. Bien, voyons ce qu’il va faire…

La réponse était évidente. Vu l’état de colère dans lequel était Soran, il n'allait pas tarder à le charger, à l’attaquer en rugissant. Il ne se fit pas attendre, il bondit.

Rikon se prépara au combat. Il ne put s’empêcher de penser, une fois encore :
Je me demande vraiment comment on en est arrivé là…

Chapitre 1 : Un style parfait, le Jutsi.

« Ha! Tsui! Sen!Aaaaaaaaaaaaaah! 
_Encore à faire tes exercices, hein ? »

Rikon sursauta. C’était Rukin, sa mère.

« Oui, mère.
_ Tu n’es pas obligé d’en faire tant, Rikon. Ton père est déjà très fier de toi.
_Je sais, mère. Mais je ne maîtrise pas la forme à une lame du Mangeki et père la maîtrise à deux lames. En plus, il dit que c’est à partir du moment où je maîtriserai ce mouvement en entier que je pourrais commencer à entrevoir ma voie de style de combat dans le Jutsi.
_Je sais tout ça aussi bien que toi, Rikon. Mais tu n’as encore que 14 ans, tu as le temps devant toi, répondit-elle »

Sur ce, elle tourna les talons, et sorti de la salle d’entraînement. Rikon crut l’entendre murmurer mais il n’en était pas sûr. Il amplifia son audition via le Courant, mais n’entendit rien. Rikon secoua la tête.

Ce devait être mon imagination... Reprenons

Il continua ses exercices. Après une bonne heure, il finit par s’affaler sur le tatamis, épuisé. Il repensa à l’intrusion de sa mère, et réalisa qu’elle était repartie sans rien lui demander de particulier. Cela ne lui ressemblait pas. Ses pensées revinrent à son père, et à l’étrange couple qu’il formait avec elle; lui maître du Jutsi, elle détestant la violence.

Son père n'utilisait son arme que lorsqu'il le devait, mais ça n'enlevait pas le fait qu'il était un maître d'arme puissant, et qu'il s'entraînait ou enseignait souvent sur le Jutsi, alors que sa mère était tout sauf violente, ne levant pas la main sur ses enfants, n'augmentant jamais le ton pour se faire entendre. Elle était une femme à la fois discrète et silencieuse, mais imposait une présence inspirant le respect. Lorsqu'elle parlait, elle le faisait dans un but précis, et tout le monde buvait ses paroles, qu'elles soient aussi simples que quotidiennes ou réfléchies et posées.

Son père, à l'opposé, alors qu'il était adepte d'un Courant pour la défense d'autrui, était assez colérique, et parfois même dur avec ses élèves. En-dehors de l'entraînement, il se reposait sur la simplicité et le calme de sa femme, évitant ainsi de s'énerver. Évidemment, dans les cas extrêmes, son caractère reprenait parfois le dessus, mais il n’était jamais aussi dur avec ses enfants qu’il ne l’était avec ses élèves.

Rikon se souvenait d’une colère magistrale de son père à l’entraînement, où d’ailleurs il ne le considérait pas comme son fils mais comme son élève. La colère en question concernait évidemment la position Tsu Ki du Mangeki, qu'il n'arrivait jamais à reproduire à l'exacte.

La position était précise au millimètre... mais nécessaire dans l'apprentissage du Mangeki. Elle visait à se tenir en garde d'une manière à éviter toute attaque portée en allongeant son bras ou en portant son arme à la manière d'une lance. Le but était d'avoir la jambe opposée à la main forte -pour Rikon, la main droite - fléchie de manière à pouvoir bondir à tout moment. La difficulté résidait à laisser la jambe droite libre de tout mouvement : coup de pied, balayage au sol, seconde impulsion... Tout le poids du corps reposait donc sur la seule jambe gauche, ce phénomène d'autant plus accentué par la position du dos au maximum parallèle par rapport au sol, pour pouvoir s'étirer d'un coup en même temps qu'on utilisait l'impulsion de la jambe.

Pour un jeune apprenti du Jutsi, la priorité était d'abord de suffisamment musclé les jambes pour se permettre de tenir correctement sur une jambe sans vaciller. La difficulté pour Rikon avait plutôt été la seconde étape : apprendre à utiliser le Courant pour minimiser puis éliminer les tremblements dans sa jambe gauche lorsqu'il se mettait en position. Le but de la position était de concentrer sa force dans la jambe, afin de parer une attaque puissante, mais dès lors qu'il y avait un tremblement, la maneuvre perdait de sa précision, et contre un adversaire expérimenté, qui frappait vite et fort, cette perte pouvait signifier la mort.

Voilà pourquoi son père avait tendance à s'énerver lorsque Rikon ne se concentrait pas assez sur sa jambe gauche fléchie, même si c'était pour mieux considérer l'ennemi. Selon son père, les deux étaient possibles. Rikon avait fini par en douter, et lorsqu'il avait exprimé ses doutes, son maître l'avait sermonné, et avait fini par exploser. Rikon était parti en courant de la salle d'entraînement, jurant de ne plus jamais revenir au cours de son père. Moins d'une demi-journée plus tard, il y retournait, demandant pardon à son maître.

Rikon sourit. Peut-être que père était sévère, mais il avait d'autres soucis en tête... et puis il pensait bien faire. Peut-être faisait-il bien, d'ailleurs...

Son père était le plus fort bretteur des Adeptes, et son style de combat, le Jutsi, était toute sa vie. Plus qu'un style de combat, le Jutsi était un ensemble de techniques de difficultés variables, qui, associées, menait le bretteur vers une quête de son propre style de combat. Le Jutsi était une voie sur laquelle se construisait ce style. Mais seuls les maîtres du niveau de son père pouvait prétendre atteindre leur style idéal. Avant d'arriver à ce stade, son père avait maîtrisé parfaitement chaque technique du Jutsi.

Il disait que c'était à cette unique condition qu'on pouvait atteindre un style pure et juste, accordé parfaitement à notre personnalité, bien que cette condition nécessaire ne soit pas suffisante. Le Jutsi était communément séparé en 5 grandes formes de combats qui étaient autant d'étapes nécessaires à l'établissement de son propre Jutsi.

La première était le Tiri, qui regroupait les techniques de bases de combats au corps à corps, avec et sans armes : parades, coups de pieds, esquives... Un combattant maîtrisant parfaitement le Tiri pouvait rivaliser avec la plupart des lutteurs de la galaxie. Rikon avait mis deux ans à le maîtriser, grâce à l'aide du Courant. Il avait commencé son apprentissage à 10 ans par cette forme, qui était enseignée en première pour tout élève du Jutsi.

La seconde forme de combat était le Mangeki, qui regroupait des techniques fines et précises de positionnement vis-à-vis de ses armes et de l'ennemi. Ces techniques servaient aussi bien en phase d'attaque que de défense, et était une manière de prolonger le Tiri, mais s'articulait également de manière permanente avec les autres formes.

La troisième forme concernait les illusions et les techniques du Courant permettant de déstabiliser l'adversaire. C'était le Genki. Les techniques du Genki servaient surtout pour utiliser les failles de concentrations de l'ennemi, ou pour les créer. Le père de Rikon l'utilisait souvent pour déstabiliser moralement celui qu'il combattait, surtout lorsqu'il le connaissait.

La quatrième forme regroupait des mouvements compliqués d'attaques grâce au maniement de l'arme. Utilisant des techniques à une main, à deux mains, à plusieurs armes, la quatrième forme permettait de créer des brèches dans le systèmes de défense de l'ennemi, ou de renforcer le sien grâce à des réflexes et des choix judicieux. Cette forme s'appelait le Kendi. Dans un combat, le Courant permettait de guider et de diriger les mouvements du combattant, mais connaître une gamme de mouvements de sabre permettait souvent de réagir plus promptement. Le Kendi, articulé avec le Mangeki permettait des mouvements très puissants.

La cinquième forme n'en était pas une, et c'était pourtant la seule à part entière. La cinquième forme s'appelait le Nuuni Jutsi. Elle était la forme finale du Jutsi, articulée autour de toutes les techniques et de la personnalité du combattant. Elle permettait de se créer son propre style de combat. Le but était en fait de tout construire à partir des techniques déjà connues, mais pas simplement en suivant un chemin d'apprentissage, plutôt en réévaluant chaque technique dans un tout, son style de combat. En soit, cette forme permettait d'innover, de créer, de matérialiser sa technique. Et le style de Jutsi, une fois la cinquième forme atteinte, se trouvait alors en constante évolution.

A la connaissance de Rikon, seuls deux hommes avaient réussis à redéfinir leur Jutsi propre, à se démarquer de coups appris et de mouvements enchaînés sans buts profonds : son père, et un homme qui s'appelait Ryyku Toru, et qui était mort ou disparu, il ne s'en souvenait plus exactement.

Bref, son père était pour lui le meilleur maître qu'il pourrait jamais avoir, mais le fait qu'il ait atteint le Nuuni Jutsi faisait de lui un professeur exigeant, voire trop exigeant. D'autres bretteurs, moins expérimentés, et qui n'avaient pas encore trouvé leur vraie voie dans le Jutsi étaient parfois plus à même d'apprendre des coups qu'ils maîtrisaient parfaitement parce qu'il s'appuyaient beaucoup dessus. Mais aucun n'avait la panoplie de techniques et l'expérience de son père. De plus, celui-ci envisageait le Jutsi dans un tout, et sa méthode d'apprentissage faisait constamment référence à ce qu'il avait atteint, lui, et qu'il souhaitait enseigner à ses apprentis. Les autres ne faisaient qu'apprendre des techniques pour apprendre des techniques, son père avait un but plus profond, et il le rappelait constamment.

Pour Rikon, cette méthode était la seule qui lui permettrait un jour d'atteindre le stade du Nuuni Jutsi. Il maîtrisait plutôt bien le Genki, surtout pour les illusions, et avait acquis parfaitement le Tiri, ce qui était plutôt bon signe. Par contre, le Mangeki et le Kendi, surtout dans leur articulation l'un par rapport à l'autre lui donnait encore du mal. Et il ne s'entraînait encore qu'avec une seule arme...

Rikon soupira à nouveau. Il but une gorgée, se leva, et repris ses exercices sur le Mangeki.

A ce train-là, je vais y passer la nuit pour maîtriser ce mouvement...